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Lettres ouvertes à la Cinémathèque Française
8 février 2016

Témoignage 19.

J’ai travaillé à la CF pendant quelques mois, avec des contrats « à la semaine », avant d’être remercié abruptement (ou plutôt « habilement oublié »), sous de maigres prétextes . Si j’ai eu la chance de ne pas expérimenter les mauvais paiements et erreurs de salaire, je peux tout de même noter un certains nombres d’incidents, que je partage ici.
Dès le départ, on me forme pour la billetterie. On insiste à quel point il est impératif de ne pas avoir d’erreur de caisse. Dès lors, c’est ce qui retient le plus mon attention. Je fais de grands efforts pour être rapide et ne pas faire de faute.
Ayant déjà fait l’expérience d’un travail dans l’accueil dans une grosse structure culturelle, je sais que tout ne sera pas rose, mais cela ne semblait pas trop mal parti : les chefs d’équipe sont sympas et de notre côté, il n’ont pas l’air d’être là pour nous fliquer en permanence et nous mettre des avertissements, jusque là, ça me va.
Rapidement cependant, je vois les difficultés de ce genre de travail : journées longues et décalées ( de 11h ou 12h jusqu’à 21h ou 22h), pause « déjeuner » d’ à peine 20 minutes, à 17h-18h, une salle de pause exigüe, sans fenêtre, face aux toilettes qui exhalent une odeur d’égout  en permanence, pas de réduction au restaurant de la cinémathèque-hors de prix pour nos maigres salaires- et pas de distributeur de sandwich ni rien, aucun des avantages dont jouissent les employés de la Cf –on nous a bien créé un libre-pass pour assister aux séances gratuitement quand j’ai commencé à y travailler, il était valable 3 mois et n’a jamais été renouvelé, sans doute un « cadeau » que la Responsable Billetterie n’a pas voulu nous faire-  un brouhaha permanent, un public parfois insultant… on rentre chez soi complètement exténué, tout juste le temps de se coucher avant d’affronter le lendemain une autre journée de travail.
Et puis quelques faits « marquants » :
Je me rappelle cette soirée, où, après quelques heures vissés sur nos sièges devant notre caisse, ma collègue et moi réclamions depuis quelques dizaines de minutes à pouvoir aller aux toilettes. « plus tard , quand il y aura moins de monde » nous répond inlassablement une chargée de billetterie de la CF. mais ce « plus tard » ne semble pas arriver de si tôt, déjà la file s’allonge et notre pause-pipi semble s’éloigner d’autant plus… c’est alors que notre chef d’équipe de la journée revient, et il est tout bonnement scandalisé que la chargée de billetterie nous refuse notre droit à aller aux toilettes. Il s’éloignent de la foule pour s’engueuler, et lui revient, fulminant, pour nous autoriser à aller aux toilettes : « on empêche pas les gens d’aller aux toilettes enfin ! on est pas des animaux ! qu’est ce que ça veut dire , ça va pas ! » On y va à tour de rôle, penauds, sous l’œil mauvais de la CB.
Si je n’ai pas eu que très peu à faire à celle qui se qualifie elle-même de « petit Mussolini », j’ai en revanche bien mieux connu la responsable Billetterie de la Cf, chef des chefs pour nous, méprisant aussi bien les abonnés que le personnel, et qui n’a rien à envier à la première…
Un jour j’arrive pour ma prise de poste, parfaitement à l’heure (c'est-à-dire en avance d’une dizaine de minute), je croise la Responsable Billetterie de la CF, je m’apprête à la saluer quand elle m’aboie dessus « mais enfin dépêchez-vous, la billetterie ouvre à midi ! », sans plus de formes. Au début d’une longue journée de travail, ça a l’effet d’une douche froide. Je me précipite dans la salle des coffres récupérer ma caisse et j’y trouve ma chef d’équipe du jour, visiblement énervée elle aussi : « je rêve où elle vient de t’engueuler ? », je réponds oui, assez gêné. « Mais c’est pas vrai, il y a 15 minutes elle m’a demandé où tu étais, je lui ai répondu que tu n’étais pas là car ta prise de poste étant à midi, tu seras là, à temps,  quelques minutes avant midi, comme toujours ! je lui ai expliqué que tu n’étais pas en retard, et que tu ne le serais pas, que les agents étant payés à partir de midi, si la CF exige qu’ils soient là à moins le quart, ils devraient les payer à moins le quart, et que, les agents de sécurité ouvrant les portes à midi et pas avant, il est de toute façon parfaitement inutile que les agents soient en poste 15 minutes avant à attendre. Et malgré tout ces explications, elle t’a engueulé quand elle t’a croisé ? ».
Ce genre de réactions disproportionnées de la part de la RB de la CF était monnaie courante, quand on ne se faisaient pas pourrir devant les clients, c’était par téléphone ou dans un mail tout aussi agressif adressé à nos chefs d’équipe. Si par malheur nous avions des problèmes à l’accueil ou en billetterie, on faisait tout pour ne pas avoir à passer par elle, afin de ne pas se faire jeter pour rien. Ambiance ambiance.
Ayant eu le malheur de ne parfois pas être disponible les jours qui m’ont été assignés sur la planning, peu à peu je reçois de moins en moins de jours. Je sens qu’on me pousse subtilement vers la sortie. J’essaie malgré tout de montrer ma motivation, ma disponibilité… sans effet.  Quand je vois que je n’ai toujours pas reçu le planning du mois suivant alors que tous mes collègues l’ont reçu, j’appelle le responsable CO pour avoir des explications. « la cliente ne veut plus de [moi] ».et là toutes les excuses y passent : je n’ai pas l’air motivé, j’ai l’air d’être au bagne quand je suis à mon poste, je ne suis pas assez souriant…  on me dit même qu’on me l’avait dit et que je n’ai pas rectifié le tir. « dit, mais quand ? ».Mais oui, souviens-toi, cette fois où on t’a parlé entre deux portes, avec force généralités, sur « le manque de motivation de l’équipe ». Que du discours généralisé. Pas un seul mot m’impliquant spécifiquement. Je me demandais pourquoi on me faisait part de ça, à moi, au lieu d’envoyer un mail à tous les agents…  il aurait donc fallu que je lise entre les lignes, que je fasse cet effort là, pour lui éviter de faire son sale boulot de dire des choses désagréables à ses employés… et je me dis,  motivé pour quoi ? un travail mal payé sans perspectives d’évolution ? je suis pourtant heureux d’être à la CF, moi qui ait fait des études de cinéma, je suis content d’échanger sur les films avec les abonnés. Comment ne pas avoir l’air fatigué après 10h passées dans le stress, le bruit et la foule ? comment avoir l’air fringuant à 22h, quand tu es là depuis 11h du matin ? pas assez souriant ? oui c’est vrai, à 21h, entre deux films, quand il n’y a personne devant ma caisse, je ne souris pas, la fatigue se lit sur mon visage, certains croient même que je fais la tête (à tort). Mais quand un client arrive en face de moi, que je lui parle, je lui sourit en lui disant bonsoir, en lui disant merci, en lui souhaitant un bon film, je plaisante avec lui, je m’anime, car je suis en face d’un autre être humain ! je n’arrive pas à être un robot-sourieur.
A la suite de ce chapelet mauvaises excuses, je m’écris : « mais je ne fais jamais d’erreurs de caisse ! ce n’est pas ça le plus important ? je n’ai pas fait perdre d’argent à la cinémathèque ! ». eh bien non, ce n’est pas le plus important. CO et la Cf préfèrent des robots-sourieurs qui le restent en toutes circonstances, malgré leurs erreurs de caisses et imbroglio impossibles à démêler. L’erreur est humaine mais pas celle de ne pas sourire.


J’ajouterais, à l’attention de Monsieur Toubiana, que j’aimerais qu’il m’explique comment il aurait été possible que nous allions le voir dans son bureau, étant donné qu’il est à un étage verrouillé par un code, dont, nous, petit personnel, n’avons jamais eu la combinaison.

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